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Allumer une bougie, une action banale, initie une séquence complexe de réactions chimiques : la combustion de la cire de la bougie. La lumière festive de la bougie est émise par les particules de suie formées à partir de plus petites molécules réactives de la flamme.
La suie, bien qu’aidant à créer l’ambiance tamisée de la bougie, est l’une des plus dangereuses émissions issues de la combustion, qui affecte la qualité de l’air, le climat et même la santé humaine. Des propriétés importantes des particules de suie émises, comme leur concentration, taille, nature chimique ou réactivité, dépendent du carburant choisi et des conditions de combustion.
Le problème lié aux émissions de combustion est considérable, et continue de croître avec le nombre de voitures, camions, avions ou centrales électriques à travers le monde. En effet, la combustion des énergies fossiles –charbon, pétrole et gaz naturel- contribue à plus de 80 % de la consommation énergétique mondiale actuelle. Cette proportion énorme diminuera seulement petit à petit, en raison de la longue durée de vie des installations et de la technologie actuelle. Afin de rendre la combustion plus propre, et de satisfaire les contraintes de qualité de l’air, il devient important de comprendre les réactions chimiques qui conduisent à de telles émissions indésirables.
Une meilleure compréhension de la chimie de la combustion nécessite des informations sur un grand nombre d’espèces (des centaines !) qui peuvent se former pendant les réactions. Pire encore, certaines espèces sont très réactives et instables ; elles existent dans d’infimes concentrations et sont difficiles à quantifier. Il est également important de s’intéresser à leur structure moléculaire pour savoir de quelle manière elles réagissent. Par exemple, le gaz butane a deux isomères différents, tous deux de même formule chimique, mais le n-butane, linéaire, et son jumeau moléculaire, appelé iso-butane, présentent différentes caractéristiques de flamme et de potentiel d’émission.
L’identification de la structure de toutes les espèces stables ou instables formées pendant la séquence de réaction est donc l’une des étapes cruciales pour améliorer les modèles de réaction chimique. Les expériences les plus avancées, permettant d’identifier les différents isomères dans des flammes, sont réalisées par photoionisation et spectrométrie de masse sur synchrotron, disponibles seulement dans quelques installations à travers le monde. Toutes les espèces, isomères compris, peuvent en théorie être ionisées de manière sélective par un rayonnement synchrotron extrêmement brillant et d’énergie de photon variable, puis détectées à partir de leurs masses et charges électriques. Toutefois, un pouvoir discriminant encore supérieur a été dernièrement démontré à partir d’un dispositif d’analyse de flammes par spectroscopie en coïncidence « photoélectron-photoion » (PEPICO).
Photo 1 : La première expérience de flamme sur la ligne DESIRS, avec le spectromètre DELICIOUS3 qui permet une double imagerie de détection en coïncidence “photoélectron-photoion ».
a) Flamme du cyclopentène, carburant liquide, brûlé dans un environnement d’oxygène basse pression afin d‘étudier les espèces chimiques spécifiques impliquées dans les premiers stades de formation des espèces aromatiques et des suies. Les espèces chimiques de la flamme sont échantillonnées à travers le cône de flamme et analysées par le spectromètre en coïncidence.
b) Chambre de combustion montée sur la ligne de lumière DESIRS
Les équipes de SOLEIL et de l’Université allemande de Bielefeld ont donc collaboré pour installer une nouvelle expérience de combustion sur la ligne DESIRS, utilisant le spectromètre DELICIOUS3 i²PEPICO pour analyser la multitude d’espèces chimiques impliquées dans la réaction de combustion, avec une résolution en énergie de photons sans précédent. Cette expérience a montré pour la première fois le potentiel d’une analyse de flamme multiplexe par le dispositif PEPICO à énergie de photon fixe [1]. Dans une flamme issue d’un carburant gazeux relativement simple comme l’éthylène, il a été possible de détecter clairement la présence d’espèces isomères intermédiaires grâce aux mesures PEPICO avec une énergie de photon appropriée. Au lieu de mettre en place des balayages chronophages sur une large gamme d’énergie de photons jusqu’à atteindre le seuil d’ionisation pour la plupart des molécules de flamme ciblées, le dispositif unique installé à SOLEIL a permis l’identification d’espèces intermédiaires stables et de radicaux, en particulier de jumeaux comme l’allène et le propyne, ou encore le triplés 1- et 2-butyne et 1,3-butadiène, à partir d’une seule série de mesures à l’énergie de photons la plus efficace.
Cette méthode est désormais étendue à des prototypes de carburants liquides comme le cyclopentène, carburant d’hydrocarbure conventionnel, et un petit ester représentatif de la chimie de combustion des biocarburants. Dans les deux cas, les voies qui mènent à la formation de molécules aromatiques et de suies sont différents, et donc particulièrement intéressants. Ces carburants plus complexes sont plus proches de ceux utilisés au quotidien, ce qui rend les résultats d’autant plus pertinents pour envisager le développement futur de nouveaux modèles de combustion.
Photo 2 : La chimie de combustion suivie avec le spectromètre en coïncidence : pendant qu’ils sont enregistrés, Les spectres de masse des ions et électrons apportent une première image de la chimie complexe d’une flamme de carburant liquide.