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Structure de cristaux colloïdaux

Des chercheurs du laboratoire MONARIS, du LPS et de SOLEIL ont réussi à cristalliser des cristaux colloïdaux d'or constitués de nanocristaux poly ou monocristallins, et leurs structures ont été révélées par la ligne de lumière de bio-cristallographie PROXIMA-1. Leurs résultats sont publiés dans CrystEngComm.

Lorsque des nanocristaux d'or possèdent une distribution de tailles réduite, ils peuvent s'auto-assembler en structures mésoscopiques tridimensionnelles ordonnées appelées « cristaux colloïdaux ». L'intérêt que suscitent ces cristaux colloïdaux provient des propriétés collectives des nanocristaux qui dépendent de leur agencement. En effet, l'organisation périodique des nanocristaux dans les cristaux colloïdaux engendre une nouvelle classe de matériaux fonctionnels susceptibles de posséder des propriétés spécifiques, ces dernières étant différentes de celles des nanocristaux ou de la phase désordonnée correspondante ; ceci concerne notamment le couplage plasmonique et les propriétés électroniques.

L'un des défis liés au développement des technologies basées sur ces matériaux est de contrôler précisément le processus d'auto-assemblage. Une condition préalable à la compréhension de leurs propriétés physiques est la connaissance détaillée de la structure interne de tels matériaux.

Contrairement aux boîtes quantiques, et en raison de leur faible énergie de formation, les défauts cristallins tels que les macles sont souvent présents dans les nanocristaux de métaux nobles. La présence ou non de tels macles affecte la forme globale du nanocristal. Dans cette étude, la microscopie électronique en transmission révèle que les monocristaux d'or présentent majoritairement une forme octaédrique tronquée tandis que les polycristaux sont observés sous forme d'icosaèdres et de décaèdres (Figure 1). En raison de la difficulté associée au contrôle de la quantité de macle dans un métal cubique à faces centrées (cfc), le rôle des défauts cristallins reste peu clair lors de l'auto-assemblage de nanocristaux d'or.

Figure 1 : Monocristaux (octaèdre tronqué) et polycristaux (décaèdre et icosaèdre) avec les images correspondantes de microscopie électronique en transmission.

Les nanocristaux d'or enrobés de dodécanéthiol utilisés dans cette étude ont un diamètre moyen de 5 nm avec une polydispersité inférieure à 7 % (Figure 1). En augmentant leurs interactions attractives par diffusion de mauvais solvant, les nanocristaux d'or s'auto-assemblent spontanément en cristaux colloïdaux submillimétriques. La quantité de défauts cristallins dans les nanocristaux a été contrôlée au moyen d'un procédé de ségrégation cristalline. De grands cristaux colloïdaux octaédriques ont été obtenus avec soit des polycristaux soit des monocristaux (Figure 2). En première observation, les images de microscopie électronique à balayage (Figure 2) ne révèlent aucune différence de structure entre les deux types.

Figure 2 : Images MEB typiques à faible grandissement et haute résolution de cristaux colloïdaux d'or constitués de polycristaux ou de monocristaux.

La large gamme de vecteurs de diffusion de PROXIMA-1 a permis de collecter des figures de diffraction en lien avec la position du nanocristal et son orientation à l'intérieur du cristal colloïdal. Les figures de diffraction de cristaux colloïdaux de 50 µm ont été acquises sur le détecteur Pilatus 6M et ont permis de reconstruire précisément l'espace réciproque aux niveaux des nanocristaux ainsi que celui du cristal colloïdal (Figure 3). Le rôle des défauts dans le nanocristal d'or pour l'auto-assemblage a été démontré en corrélant l'ordre aux échelles nano et méso. Les défauts cristallins présents dans l'icosaèdre et le décaèdre confèrent aux nanoparticules une forme quasiment sphérique ; ces particules s'assemblent sur un réseau cubique à faces centrées (cfc) sans ordre orientationnel. De façon différente, les nanoparticules monocristallines (octaèdre tronqué) s'auto-assemblent en un réseau cubique centré (cc) et les orientations cristallographiques de celles-ci sont très corrélées. Ce changement structural, qui est à l'opposé des prédictions théoriques, s'explique par le rôle des facettes et en particulier par le fait que la forme des monocristaux est proche de la forme de la cellule de Wigner-Zeitz du réseau cubique centré (cc).

Figure 3 : Coupes d'espace réciproque SAXS (vignettes de gauche) et WAXS (vignettes du milieu) obtenues avec des cristaux colloïdaux constitués de monocristaux (vignettes du haut) ou de polycristaux (vignettes du bas) d'or, avec le modèle correspondant de la disposition des nanocristaux (vignettes de droite).

Cette étude démontre l'importance des défauts cristallins dans les nanocristaux lors de leur auto-assemblage. Les informations ainsi obtenues sont essentielles pour comprendre les propriétés collectives des cristaux colloïdaux, ces propriétés étant hautement sensibles à la disposition des nanocristaux.