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L'étude des macromolécules biologiques, telles que l'ADN, l'ARN et les protéines, nécessite une connaissance préalable et approfondie des propriétés physico-chimiques de leurs briques constitutives, soit respectivement les bases nucléiques et les acides aminés. Expérimentalement, plusieurs espèces (isomères et tautomères) coexistent, ce qui rend très difficiles l’interprétation et la déduction des propriétés des molécules biologiquement importantes qu’elles constituent. Un consortium scientifique international, structuré autour de l’Université Paris-Est Marne-La-Vallée et comprenant notamment le CEA-Université Paris-Saclay et SOLEIL, a pu identifier les tautomères et les isomères du cation de la cytosine en phase gazeuse, en utilisant les méthodes de la chimie quantique les plus sophistiquées associées à la photoionisation VUV par imagerie de photoélectron implémentée sur la ligne DESIRS.
Ces travaux viennent de paraitre dans le Journal of the American Chemical Society.
L'étude des espèces ionisées d'ADN ou d’ARN a pris de l'importance au cours des dernières décennies, car les dommages causés par l'interaction entre rayonnements ionisants et matière biologique peuvent conduire notamment à des mutations du matériel génétique induisant des cancers. Réciproquement, en médecine, on fait en sorte de provoquer de tels dommages en irradiant la matière biologique dans le but de détruire les cellules cancéreuses. La compréhension des phénomènes mis en jeu au niveau moléculaire par l’irradiation du matériel génétique (ADN et ARN) participe au développement des traitements. Cependant, les propriétés intrinsèques des briques élémentaires de l’ADN et de l’ARN ne sont pas toutes bien connues. La réactivité chimique induite par l’irradiation est encore à l'étude et nécessite également la détermination précise des données thermochimiques et structurales des bases nucléiques neutres et ionisées. Ces entités biologiques présentent un ensemble varié de formes - isomères et tautomères - dont les spectres d’ionisation doivent être étudiés pour comprendre leur comportement vis à vis des rayonnements ionisants.
La difficulté de l’interprétation des mesures réside dans la complexité de la structure électronique de ces espèces et dans la coexistence de plusieurs conformères/tautomères/isomères très proches en énergie.
Dans ce travail, les scientifiques ont combiné l’utilisation des nouvelles méthodes ab initio explicitement corrélées qui viennent d’être implémentées dans les codes de calcul, et le rayonnement synchrotron VUV de la ligne DESIRS de SOLEIL équipée d’un spectromètre de coïncidences électron/ion à double imagerie (i2PEPICO). Ainsi, il a été possible de déterminer les énergies d'ionisation adiabatiques des tautomères et des isomères de la cytosine isolés en phase gazeuse, pour la première fois avec une précision de 0,003 eV. Les spectres expérimentaux correspondent à des bandes bien résolues qui ont pu être attribuées à la contribution spécifique de cinq tautomères/isomères de la cytosine dans le milieu étudié (cf. Figure 1).
Figure 1 : Structures des tautomères / isomères de la cytosine et leur identification dans le spectre de photoélectrons lents éjectés après photoionisation VUV. © M. Hochlaf.